samedi 21 juin 2025

4000 semaines d’Oliver Burkeman – avis de lecture

 


Résumé :

« Que souhaitez-vous vraiment faire de vos journées et de votre vie ?

Il faut se rendre à l'évidence : la durée de vie moyenne de l'être humain est scandaleusement courte. Ceux d'entre nous qui atteindront l'âge de 80 ans n'auront vécu qu'un peu plus de 4 000 semaines.

Comment vivre sereinement dans un laps de temps aussi court ? Boîtes de réception qui débordent, piles de vêtements à ranger, vacances à organiser... Pris dans la frénésie de notre quotidien, paralysés par nos to-do lists, nous finissons par perdre de vue ce qui compte pour nous.

Ancien geek de la productivité repenti, Oliver Burkeman nous propose ici un antimanuel de gestion du temps, à la fois pratique et profond. Une invitation salvatrice à accepter nos limites, pour adopter un mode de vie plus paisible et plus joyeux. »

A noter : J’ai lu la version originale en anglais

Four Thousand Weeks - comme son titre l'indique - est un livre sur la gestion du temps pour les mortels, écrit par l'ancien journaliste Oliver Burkeman. La vie est limitée, mais nos ambitions ne le sont pas. Il n'est pas rare que nous nous sentions coupables de ne pas avoir épuisé nos « listes de choses à faire » ou de ne pas avoir poursuivi notre ambition tout en accomplissant notre travail quotidien - tout cela dans le cadre de la vie limitée qui est la nôtre. Alors que la hustle culture est en plein essor, l'auteur tente de faire comprendre que la vie serait bien meilleure si nous acceptions qu'elle soit limitée et que nous ne pourrons pas réaliser tout ce que nous avons l'intention de faire.

Le titre du livre - quatre mille semaines - fait référence à la durée de vie moyenne d'un.e être humain.e, 4000 semaines équivalant à environ 77 ans. Le livre est divisé en quatorze chapitres, dans lesquels l'auteur explique comment le monde moderne est obsédé par la productivité, souvent liée au capitalisme. Un exemple que je donnerais est le mythe de l'efficacité au travail dont parle l'auteur : si un.e employé.e accomplit ses tâches dans le temps imparti, il.elle n'obtient pas plus de temps, on lui.elle confie plus de tâches. L'auteur donne plusieurs exemples contemporains, sur les attentes déraisonnables que nous avons envers nous-mêmes et sur l'acceptation du fait que « se poser » n'est pas une mauvaise chose, mais quelque chose de positif.

J'ai aimé l'idée du livre, ainsi que le message que l'auteur essayait de faire passer. Je suis passé par le cycle de « l'obsession de la productivité » et par le fait de considérer la vie comme une quête permanente de « développement de la personnalité », me sentant à chaque fois coupable de simplement me détendre. J'ai trouvé que l'auteur donnait également plusieurs exemples contemporains, en rapport avec le lectorat actuel, tels qu'Amazon - et leur obsession d'avoir leur page d'accueil chargée aussi vite que possible (ce qui est une question de secondes). C'est un livre qui est sorti en 2021 et que j'ai lu en 2025, et donc une chose qui manque dans le livre, ce sont les modèles d'IA interactifs que nous avons aujourd'hui.

L'annexe, avec les dix suggestions sur la gestion du temps, était intéressante et j'ai eu l'impression qu'elles étaient pratiques. Cependant, elle ne correspondait pas au ton du livre, étant donné que l'auteur nous disait d'ignorer la plupart des conseils relatifs à la « gestion du temps » donnés par des livres et des influenceurs et, en fin de compte, donnait lui-même une série de conseils, comme tous les autres auteurs sur ce sujet.

En conclusion, je dirais que ce livre est une bonne lecture et qu'il est utile si l'on veut sortir de l'obsession de la productivité. Le livre a ses défauts, mais à la fin, le lecteur a quelque chose à en retirer. Sur cette note, j'attribuerais à ce livre une note de sept sur dix.

La note – 7/10

Bonne journée
Andy

samedi 14 juin 2025

Propre d’Alia Trabucco Zerán – avis de lecture

 


Résumé :

« Le monologue d`une domestique qui retrace, dans un récit lucide, impitoyable et brutal, les étapes menant au drame qui fera s`effondrer le décor d'une vie "propre".

« Je m'appelle Estela, vous m'entendez ? Es-te-la Gar-cí-a. »

La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence son récit. Estela, qui a quitté sa famille dans le sud du Chili pour la capitale où elle travaille comme employée de maison. Estela, qui s`est occupée pendant sept ans de la jeune victime, l'a bercée, nourrie, rassurée, grondée aussi. Qui connaît chaque étape ayant mené au drame : la chienne, les rats, les aveux, le poison, le pistolet. Chaque étape jusqu'à l`inéluctable.

Un roman psychologique haletant, angoissant et addictif, à travers lequel notre époque se dessine – une société fracturée par les rapports de domination et d'argent, où les uns vivent dans l`ombre des autres. »

Propre est un roman écrit par l’autrice chilienne Alia Trabucco Zerán, dont j’ai lu la traduction française réalisée par Anne Plantagenet. Le personnage principal, également narratrice, est une domestique, Estela Garcia, originaire d’une campagne chilienne. Elle quitte sa région pour travailler à la capitale chez une famille riche, composée d’une avocate, d’un chirurgien et de leur fille Julia.

’ai apprécié le fait que le roman commence immédiatement, mais c’est aussi sa faiblesse. C’est-à-dire, dès le début, on apprend que la fille de la famille est morte, et la fin nous révèle comment et pourquoi. Le roman illustre bien les différences de classe sociale au Chili et le fossé entre les perspectives des personnages.

Cela dit, je n’ai pas d’autres points positifs à relever. Bien que le roman ne fasse que 270 pages, j’ai eu l’impression de lire l’un des ouvrages les plus longs de ma vie. e vais être honnête : je ne suis peut-être pas la meilleure personne pour juger ce livre, car à mi-parcours, l’autrice m’a perdu. Lorsque l’héroïne rend visite à sa mère malade dans le sud, j’ai eu du mal à comprendre l’enchaînement des événements. J’ai trouvé qu’il me manquait des éléments de contexte—notamment les raisons qui l’ont poussée à quitter la campagne pour Santiago et pourquoi sa vie est supposée être meilleure dans la capitale.

La narration à la première personne m’a souvent paru gênante, surtout lorsqu’Estela s’adresse directement au lecteur et brise le quatrième mur à plusieurs reprises. Une ou deux fois, cela passe, mais après un certain nombre, j’en suis venu à me demander si le roman se voulait sérieux.

J’aime bien lire la littérature étrangère et j’ai eu beaucoup d’attente pour découvrir le pays du Chili. Même si je n’ai pas compris une moitié du livre, c’est quand même une faute du roman, et j’ai trouvé qu’elle avait traîné une intrigue qui n'avait pas de contenu au-delà d'un point. J’aimerais bien d’essayer un autre roman d’un.e aut.eur.ice chilien.ne mais je n’ai pas eu une bonne expérience en lisant celui-ci. Je donnerai une note de trois sur dix.

La note – 3/10

Bonne journée
Andy

samedi 8 mars 2025

Junil de Joan-Lluís Lluís – avis de lecture

 


Résumé :

« À l'aube du premier siècle, aux marges de l'Empire romain, la jeune Junil travaille dans la librairie de son père tyrannique. Elle fabrique des rouleaux de papyrus aux côtés d’esclaves qui lui apprennent à lire. Les vers du grand Ovide, surtout, éveillent en elle des émotions puissantes.

Bientôt contrainte de fuir l’Empire, Junil embarque avec trois amis esclaves dans un voyage périlleux au cœur des terres barbares. Mais qui sont au juste ces barbares ? Et si, au bout du chemin, ce n’était nul autre que le poète exilé, Ovide en personne, qui les attendait ?

Junil est un conte moderne, le récit d’une quête de liberté et de tendresse face à un monde implacable. Avec ce roman devenu un véritable phénomène public en Catalogne, Joan-Lluís Lluís nous offre un hommage vibrant au pouvoir émancipateur des histoires. »

Junil est un roman catalan de Joan-Lluís Lluís, connu pour ses romans et essais en catalan. Il s’agit d’un roman historique qui se déroule à l’époque romaine. Junil est une jeune fille dont le père, abusif, envisage de la vendre comme esclave ou de l’envoyer dans un bordel. Ce père tient une librairie à Nyala, où Junil apprend le métier en côtoyant des esclaves et des hommes libres, parmi lesquels un poète et un ancien gladiateur. L’un des esclaves, Trident, lui enseigne la lecture, et elle se passionne pour la poésie d’Ovide, qui fait partie des ouvrages de la librairie.

À la suite d’un événement, Junil et son entourage – Trident, Ovide et Dirmini le gladiateur – doivent fuir Nyala. Ils et elles se lancent alors dans une aventure à la recherche du pays des Alains.

C’est une belle histoire d’aventure avec de nombreux personnages, chacun et chacune portant en soi un passé marqué par l’oppression ou l’esclavage. L’entourage de Junil découvre la liberté pour la première fois, malgré les dangers omniprésents du voyage. Bien que l’intrigue se déroule sous l’Empire romain et que les protagonistes quittent ses frontières, il ne s’agit pas d’un roman politique, mais plutôt d’un récit d’aventure, d’amitié et parfois d’amour.

Cependant, je ne qualifierais pas ce livre de roman historique à proprement parler, car il est difficile de situer précisément les villes et villages mentionnés, à l’exception de Tomis – l’actuelle Constanța en Roumanie. Tomis est évoquée dans le récit pour raconter l’histoire d’un personnage, mais l’intrigue ne s’y déroule jamais.

J’ai trouvé intéressant que l’esclavage soit présenté comme une réalité tellement ancrée dans l’Empire que les personnages eux-mêmes peinent à imaginer un endroit sans esclaves – notamment le pays des Alains, qu’ils et elles jugent presque inconcevable.

Le choix de ne pas s’appuyer sur une cartographie précise de l’époque est à la fois une force et une faiblesse : une force, car il permet de se concentrer davantage sur les personnages et leur évolution ; une faiblesse, car il donne parfois l’impression de lire une aventure dans un monde imaginaire. En tant que roman d’aventure, le récit regorge de rencontres au fil du voyage, et certaines figures secondaires rejoignent même le groupe de fugitifs, ce qui peut parfois rendre le suivi des personnages un peu difficile.

Si le titre met en avant Junil, j’ai trouvé que son importance diminuait progressivement au fil du récit. Certes, c’est à cause d’elle qu’ils et elles doivent fuir Nyala, mais j’ai trouvé que des personnages comme Dirmini, Ovide et Trident étaient mieux développés et plus marquants. En revanche, Junil reste relativement énigmatique : peu d’éléments permettent de cerner sa personnalité ou d’observer son évolution au cours du voyage.

En conclusion, j’ai apprécié cette lecture, bien que certaines parties m’aient semblé ardues. Celles et ceux qui aiment la poésie y trouveront un intérêt particulier, car les vers attribués au personnage d’Ovide y sont fréquemment cités. Je lui attribue une note de sept sur dix.

La note – 7/10

Bonne journée
Andy

lundi 24 février 2025

Seule de Nesrine Slaoui – avis de lecture

 


Résumé :

« Deux vies en parallèle.
Celle d’Anissa, une adolescente qui vit à Argenteuil, et celle de Nora, trentenaire parisienne.
La première est victime d’un harcèlement scolaire violent et finira par en mourir.
La deuxième lutte sur tous les fronts à la fois, contre le sexisme et le racisme qu’elle endure au quotidien, et pour ne pas se laisser broyer par une relation de couple nocive.
Qu’est-ce qui les lie, sinon bien sûr de subir la brutalité du monde ? Est jusqu’où faudra-t-til aller pour en finir avec la violence des hommes ?

Inspiré de faits réels qui s’éclairent ‘un l’autre par le détour de la fiction, Seule nous plonge au cœur  de multiples problématiques contemporaines, de l’addiction aux réseaux sociaux à l’intériorisation des comportements genrés, et jusqu’au sujet complexe entre tous de la tégitime défense de femmes en danger de mort. »

Seule est un roman qui raconte l’histoire de deux jeunes femmes issues de générations différentes : Nora, une trentenaire, et Anissa, une adolescente encore au lycée. Malgré cet écart d’âge, elles partagent des luttes similaires. Nora fait face à de nombreux problèmes, notamment dans sa relation amoureuse, mais aussi dans la société, où elle subit à la fois le racisme et le sexisme. Cette dimension intersectionnelle est particulièrement intéressante. De son côté, Anissa est une élève harcelée dans son lycée à Argenteuil. En quête de reconnaissance et d’attention, son quotidien change avec l’arrivée de Dylan, un nouvel élève.

J’ai apprécié les thèmes et les sujets abordés par l’autrice, qui met en lumière les injustices sociales persistantes touchant les femmes racisées, indépendamment de leur âge. Son écriture m’a également séduit, notamment par les touches de poésie qu’elle intègre de temps en temps. Avec moins de 140 pages, Seule est une lecture rapide, mais son contenu reste percutant et parfois difficile, en raison des sujets traités.

Cependant, la brièveté du roman constitue aussi une faiblesse. J’ai trouvé que la rencontre entre les histoires de Nora et d’Anissa se faisait un peu trop rapidement, laissant peu de place au développement des personnages secondaires. Un autre point qui m’a dérangé concerne la quatrième de couverture rédigée par l’éditeur (Fayard), qui en révèle beaucoup trop. Cela a réduit l’impact de certains événements du roman, qui auraient gagné à être découverts au fil de la lecture.

C’est un livre accessible à tous – je suis moi-même un homme cis – et j’ai pu comprendre et ressentir les émotions des personnages dans la plupart des situations. Néanmoins, certaines expériences me restent plus lointaines. Par exemple, je n’ai pas totalement saisi la douleur de Nora face à la déception amoureuse avec son ex. Peut-être que d’autres lecteurs ou lectrices s’y identifieront davantage ? N’hésitez pas à partager votre avis en commentaire.

En conclusion, Seule est une lecture fluide qui aborde des thématiques fortes et pertinentes. Je lui attribue la note de sept sur dix.

La note – 7/10

Bonne journée
Andy

samedi 15 février 2025

L’indésiderable d’Inaam Kachachi – avis de lecture

 


Résumé :

« Taj Al-Moulouk et Widiane sont liées par la mémoire d’un pays, l’Irak. Forcées de s’exiler pour survivre, les deux femmes, qui appartiennent pourtant à des générations différentes, sont devenues amies à Paris, leur terre d’accueil. Une même question les hante : comment accepter le déracinement, la perte du pays qui les a vues naître ? Pour l’une en racontant le passé, pour l’autre en le taisant à tout jamais. Au gré de leurs récits entremêlés se dessine un portrait nuancé de l’Irak du siècle dernier.

Mélancolique ode à un pays englouti par la violence du XXe siècle, ce roman nous emporte dans les puissants souvenirs de ces femmes libres. »

L’indésirable est un roman écrit par la journaliste Inaam Kachachi, d’origine irakienne. Le roman, rédigé en arabe (irakien), traverse différentes époques – depuis l’époque où l’Irak était un royaume, jusqu’aux années 1950, puis la transition vers une république. Il met en scène des personnages principaux contraints à l’exil en raison de la situation politique.

On suit Taj Al-Moulouk, une journaliste à Bagdad – une profession rarement exercée par des femmes à son époque. Widiane, une musicienne d’origine irakienne également, est notre deuxième protagoniste ; elle appartient à une génération différente de Taj et ne partage pas sa nostalgie pour l’Irak. Enfin, le troisième personnage principal est Mansour, un palestinien qui a dû se réfugier au Pakistan après la Nakba de 1948 en Palestine.

Les trois personnages ont des vies très différentes. Taj, issue d’une famille très conservatrice, chérit sa liberté en tant que journaliste et apprécie côtoyer des hommes influents, comme le roi d’Irak. Plus tard, elle s’installe au Pakistan et devient présentatrice à la radio arabe, où elle entre en contact avec Mansour.

Le roman traverse plusieurs pays, continents et époques, ce qui est un des aspects que j’ai particulièrement appréciés. En suivant Taj et Mansour, on voyage en Europe, en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud, et on explore les bouleversements politiques et sociaux de ces régions. Le thème de l’exil est omniprésent : aucun des trois personnages ne peut retourner dans son pays d’origine en raison de la situation politique, que ce soit en Irak ou en Palestine.

J’ai écouté une interview d’Inaam Kachachi sur France Culture, où elle explique que tous les personnages du livre sont inspirés de personnes réelles. Il y a eu une journaliste irakienne qui a voyagé partout et mené une vie particulièrement « intéressante », ainsi qu’un homme politique palestinien exilé au Venezuela et une jeune musicienne irakienne (Widiane) dans son entourage. Cela dit, j’ai trouvé que c’était aussi une faiblesse du roman : l’autrice en a fait une sorte de biographie de Taj Al-Moulouk, racontant sa vie depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse, ce qui dilue parfois l’intrigue.

Même si l’autrice affirme s’être basée sur des faits réels, j’ai trouvé certains éléments difficiles à croire, notamment la manière dont Taj Al-Moulouk est dépeinte comme une sorte de James Bond irakienne. Une scène en particulier m’a semblé exagérée : lorsqu’elle prétend avoir sauvé la résistance algérienne contre l’agression française. Nous avons tous tendance à embellir notre passé, surtout lorsqu’il ne peut plus être vérifié, et j’ai l’impression que l’autrice a pris ces récits pour argent comptant, sans les remettre en question.

Le roman aurait gagné en qualité si l’autrice s’était davantage concentrée sur certaines périodes clés de la vie de Taj, plutôt que d’en faire un récit biographique exhaustif. De plus, avec trois personnages principaux, je me suis parfois perdu en cours de lecture et j’ai eu du mal à suivre leurs histoires respectives.

En conclusion, je dirais que le roman avait un énorme potentiel, mais qu’il souffre de certaines faiblesses qui ont terni mon plaisir de lecture. Toutefois, la construction des trois personnages et l’analyse politique des différents pays sont des points positifs. En fin de compte, mon avis reste mitigé : il y a des aspects que j’ai appréciés et d’autres qui m’ont laissé sceptique. Je donne donc au roman la note de cinq sur dix.

La note – 5/10

Bonne journée
Andy

samedi 8 février 2025

Kallocaïne de Karin Boye – avis de lecture

 


To read my book review in English, click here

Résumé :

« Dans une société où la surveillance de tous, sous l'oeil vigilant de la police, est l'affaire de chacun, le chimiste Leo Kall met au point un sérum de vérité qui offre à l'État Mondial l'outil de contrôle total qui lui manquait. En privant l'individu de son dernier jardin secret, la kallocaïne permet de débusquer les rêves de liberté que continuent d'entretenir de rares citoyens. Elle permettra également à son inventeur de surmonter, au prix d'un viol psychique, une crise personnelle qui lui fera remettre en cause nombre de ses certitudes. Et si le rêve des derniers résistants, une mystérieuse cité fondée sur la confiance, n'en était pas un ? Kallocaïne est le chaînon manquant entre Fahrenheit 451, Le meilleur des mondes et 1984. Dès 1940, la dystopie visionnaire de Karin Boye interroge les limites, s'il y en a, du contrôle que peut exercer un État totalitaire sur ses citoyens. »

A noter : C’est un roman écrit en suédois et j’ai lu sa traduction anglaise

Kallocaïne est un roman dystopique écrit par l'autrice suédoise Karin Boye durant l'entre-deux-guerres. L’histoire se déroule dans un futur dystopique où un gouvernement mondial, traduit en anglais par l’Etat mondial, exerce un contrôle absolu. Ce régime est, à bien des égards, inspiré de l'Union soviétique. L’autrice écrit ce roman dans les années 1930, à une époque où la bataille idéologique fait rage entre le modèle individualiste de marché des Etats-Unis et le modèle collectif soviétique, et elle en propose ici une vision dystopique.

Le personnage principal, Leo Kall, est un scientifique travaillant pour l’armée de l’Etat mondial. Patriote fervent, il est convaincu que tous les traîtres doivent être « éliminés » pour préserver le régime. Il met au point un sérum qui, une fois injecté, contraint la personne à dire la vérité et à révéler toutes ses pensées opposées au régime. Il baptise cette invention de son propre nom : Kallocaïne. Cependant, il est aussi un personnage profondément anxieux, persuadé que sa femme est amoureuse de son supérieur, Rissen. Obsédé par l'idée d’obtenir la vérité d’elle, il se retrouve entraîné dans une spirale de problèmes qui constituent le cœur du roman.

Pour ma part, ce roman ne m’a pas convaincu ; j’ai trouvé que l’univers créé par l’autrice manquait de connexion avec la réalité. J’aurais aimé en apprendre davantage sur le fonctionnement de cet Etat mondial, mais l’intrigue se déroule principalement dans une salle d’interrogatoire où Leo administre la Kallocaïne aux épouses de soldats pour obtenir des informations sur eux. Il n’y a aucune indication sur l’événement qui a conduit à la consolidation de cet Etat, ni de descriptions du quotidien : à quoi ressemblait le paysage, quel temps faisait-il, comment les habitant.es occupaient-ils leur temps libre (même s’il s’agissait de regarder des émissions de propagande, par exemple) ?

J’ai trouvé l’idée de base intéressante, surtout dans le contexte historique de l’époque, où certains pays s’orientaient vers une économie planifiée et une société collectiviste, et où l’autrice imagine une version dystopique de cette évolution. Cependant, elle semble hésiter entre construire son univers et explorer les insécurités de Leo, et au final, elle ne parvient à approfondir ni l’un ni l’autre.

Ce n’est pas un roman très long, mais j’ai trouvé sa lecture laborieuse. La science-fiction et les romans dystopiques ne sont pas mon genre de prédilection, mais je pense lui avoir donné une chance honnête. Pour un lecteur comme moi, le livre aurait pu mieux fonctionner si l’autrice avait clairement choisi un axe principal et relégué l’autre à un rôle secondaire au lieu de tenter d’équilibrer les deux. Alors, j’attribue au roman la note de trois sur dix.

La note – 3/10

Bonne journée,
Andy